walking in the rain

Aujourd’hui, c’est mercredi. Comme d’habitude, ma matinée est consacrée à l’étude de la psychologie. Un cours assez spécifique pour aujourd’hui mais je ne me lancerai pas dans une explication. Ce serait trop compliqué pour les personnes ne suivant pas ces études. Bref, tout ça pour vous dire que ce matin, si je dis me lever, c’est pour aller en cours. Après avoir pris ma douche, je me dirige vers la cuisine commune de la confrérie, je prends quelques petits gâteaux en guise de petit déjeuner et je prends la route de mon cours.

Alors que je suis sur le chemin, voilà que je vois Dray au loin. Il me considère comme sa petite sœur, je l’adore mais il est vraiment trop protecteur. Il fait ça en rigolant mais c’est parfois super lourd de le voir toujours débarquer et faire fuir les garçons qui m’intéressent. Il arrive, m’embrasse sur la joue et m’appelle "mon amour". Forcément, je me sens très gênée, et je dois expliquer la situation. Enfin, espérons qu’aujourd’hui il ne vienne pas dans mes pattes. Je continue alors mon chemin un peu plus rapidement. Et me voilà arrivée dans la salle de cours. J’y passe deux heures de la matinée, en sortant c‘est déjà l’heure du déjeuner. Je me dirige donc vers le pavillon des Omega Phi, j’y prends un bon repas avec les autres filles – d’ailleurs, le repas était très bon, je devrais venir ici plus souvent pour manger le midi – et je ne perds pas de temps à me préparer pour la suite du programme de la journée. Et oui, aujourd’hui c’est mercredi, le jour des Shakespeare’s Sons.

On se retrouve donc tous au club, Edie, Lussy, Natanjel et bien d’autres encore. On discute littérature pour changer. Aujourd’hui, on discute sur Les Misérables du français Victor Hugo. Ce roman est passionnant mais il est vraiment long. Et la vie des personnes est vraiment… misérable ! Bref, on en discute facile une heure, voire plus. Et à notre sortie, il pleut. Quelle poisse ! J’ai pas pris de parapluie, je vais être trempée… Enfin, c’est alors que Natanjel m’accosta.

" Jean Valjean est la preuve même de la capacité de l'être humain à changer pour devenir quelqu'un d'autre, par besoin de se cacher ou envie de changer de vie, au début il est complètement aveuglé par sa haine contre la société qui est, cela dit en passant, tout à fait justifié, et au fur à et à mesure de ses rencontres et de sa montée dans la société - ou même défaillance lorsqu'il retourne en prison - on se rend compte qu'il est en fait un parfait garçon, généreux, bon, juste, et assez humain(..) "

J'étais capable de parler de littérature française pendant des heures, c'était un sujet qui me passionnait et que je ne connaissais que trop bien, de ce fait, une fois lancé, il était difficile de m'arrêter, et le sujet du jour au club de lecture était Les Misérables de Victor Hugo, un bouquin que j'avais lu plusieurs fois, en français mais aussi l'adaptation anglaise, assez fidèle mais pas aussi authentique que l'œuvre originale, Victor Hugo étant un génie inimitable. Après une heure à discuter, nous sommes finalement sortis de la salle dans laquelle nous étions, et, une fois, nous nous retrouvâmes sous la pluie battante. Je soupirai, passant une main dans mes cheveux déjà mouillé par les grosses gouttes qui tombaient et cherchai alors dans mon sac mon parapluie. Je n'étais pas un grand fanatique de la pluie, je veux dire, sortir dehors lorsqu'il pleut pour sauter dans les flaques, très peu pour moi, aussi préférai-je donc ne pas m'attarder ici pour me dépêcher de rentrer. Je saluai les autres qui déjà, pour la plupart s'en allait, courant, se protégeant avec leurs vestes, sacs ou bras de la pluie et, tournant le regard par hasard, remarquai que Raina, une des filles du groupe, le genre belle brune caractérielle, était toujours là. Je me décidai donc à lui proposer - en parfait gentleman! - un abri sous mon parapluie, mais pas avant de l'avoir embêter un peu. J'ouvrai mon parapluie, me couvrant ainsi de l'averse, et m'approchai d'elle, pas trop près, afin de la laisser un peu sous l'eau:

" Dit moi Haynes, t'aurais pas oublié ton parapluie par hasard ? "

Un sourire moqueur sur les lèvres, je la poussai gentiment, de façon amicale, avant de finalement l'attirer vers moi pour qu'elle vienne s'abriter:

" J'ai trouvé ton analyse du personnage de Causette un peu plate. Cependant il serait grossier de te laisser sous cette averse n'est-ce pas ? Jean Valjean te protègerait, en bon garçon qu'il est. Je songe à prendre exemple sur lui, qu'est-ce que tu en penses ? "

Et je la gratifiai d'un sourire en coin, complice et légèrement fourbe. Non vraiment, son analyse de Causette n'avait pas été mauvaise, connaissant le livre par coeur, je n'avais pas toujours été du même avis qu'elle, mais il y a un moment où il faut savoir relativiser, et en littérature, il est possible de voir les choses de différentes façons, de plus que Raina forcement avait un avis plus féminin, plus proche du personnage de Causette, alors que moi j'avais à me dégager un peu de tout ça. D'ailleurs, j'avais toujours trouvé le personnage de Jean Valjean trop stéréotypé, trop parfait pour être vrai. Quel genre de type s'étant fait condamner à 20 ans de prison pour avoir voler un morceau de pain trouverait le moyen de pardonner à la société l'injustice dont il a été la victime ?

Sans rire, j’avais oublié mon parapluie et ça se voyait à me tête. Natanjel me poussa amicalement pour me taquiner, comme il le faisait tout le temps. Bon, moi aussi j’aimais bien l’embêter gentiment de temps et temps mais là, j’avais vraiment la rage de ne pas avoir pensé au parapluie. Bien sûr, je ne passais pas mon temps à regarder la météo à la télé mais là j’aurais dû y penser.

J'ai trouvé ton analyse du personnage de Causette un peu plate. Cependant il serait grossier de te laisser sous cette averse n'est-ce pas ? Jean Valjean te protègerait, en bon garçon qu'il est. Je songe à prendre exemple sur lui, qu'est-ce que tu en penses ?

Mon analyse de Causette trop plate ? Ouais, c’est vrai que je n’y avais pas donné tout ce que je pouvais mais … trop plate ?! Là c’était vraiment abuser mais bon, comme il eût la gentillesse de me proposer un abri quelques minutes, je ne pus vraiment dire quelque chose de méchant.

« Et bien, peut-être pourras-tu en proposer une meilleure la prochaine fois. Celle de Jean Valjean n’était pas vraiment à la hauteur du personnage. Mais ce n’est que mon avis… Après, il faut dire que c’est un personnage que je trouve assez inintéressant. Enfin, c’est qu’il n’est pas vraiment crédible. Etre généreux et non rancunier à ce point ? Moi j’y crois pas ! »

Sans attendre une seconde de plus, je me suis jetée à côté de lui pour profiter de son parapluie. Pas très digne de moi ça, mais bon, on est parfois obligé de faire des choses horribles… Je me suis donc incruster à ses côtés. C’était partie pour une petite promenade de santé. Je ne savais pas trop quoi dire, même si on aimait se taquiner, la conversation était parfois, comment dire… vide. Pour je ne sais quelle raison. Bref, j’ai donc essayé de lancer un petit quelque chose :

« Alors tes études, ça donne quoi ? »